Visites

vendredi 15 octobre 2010

La violence de la rue

Au coin des rues, on les croise.
On les croise d’une indifférence soutenue ou pas.
On passe notre chemin.
A la poursuite du temps, de l’argent.
Il est rare que quelques pièces nous échappent pour s’échoir
Au coin des rues.

Alors nous affichons un sourire gêné, poli, résolus à ne pas donner à celui qui demande.

Instant entre deux incommodant
Instant où l’on frappe à la porte de la conscience
Instant où l’on préfèrerait demeurer transporté dans le train du quotidien

Le train a fait une pause cette fois-ci.

Une dame, vieillie par ces effluves, d’un fort embonpoint, assise
Sur un carton déplié
Au sol

Elle est inerte animée de quelques soubresauts.

Un soubresaut pour soulever ce verre qui lui fait traverser le temps.
Un soubresaut pour s’asseoir.
Un soubresaut pour lever sa tête, regarder, s’incliner de nouveau et
Attendre.
Un soubresaut pour s’allonger.
Un soubresaut pour se lever et s’exposer à même la rue pour se soulager.

L’horreur de la rue, l’insoutenable.

Une révolte m’envahit.
Comment peut-on en être réduit ainsi ?
Que puis-je faire ?

Je vais à sa rencontre.

- Bonjour…
Je lui tends un sandwich.
Un soubresaut pour lever sa tête et j’entends ces deux syllabes remontées d’un passé lointain.
- Mer-ci

Je ne sais pas si elle va le manger, je ne le crois pas.

Impuissante
Sentiment imposant paralysant
Je ne peux rien faire.
Le temps passe, aussi vite que ce verre et pourtant elle attend indéfiniment.

Qu’attend-elle ?
Que le train s’arrête ?

Le soir tombe.

Une dame, un peu plus vieillie par les effluves, d’un fort embonpoint, allongée
Sur un carton déplié
Au sol

Où ira ce train demain ?

Paris, 15/10/2010

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire