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lundi 26 juillet 2010

Ces rêves là, ces rêves ci...

Pas si aisé que cela de se remémorer ses rêves du passé lorsque l’on ne les a pas réalisés.

Je me souviens d’avoir rêvé d’être missionnaire alors que je venais de faire une incroyable expérience avec Dieu, j’avais 12 ans. Missionnaire, non pas pour imposer une religion mais pour partager ce qui venait de me bouleverser. Missionnaire, oui, où ? En Malaisie. Car c’était mon origine. Je rêvais d’y aller pour connaître ma famille. Deux desseins pas forcément liés mais à 12
ans c’était évident. Depuis je suis effectivement allée en Malaisie mais en simple touriste.

Missionnaire, voilà mon premier rêve.

Et le temps est passé, les études m’ont prise. Une fois l’école d’ingénieurs terminée, une porte professionnelle dans l’humanitaire aurait pu s’ouvrir mais elle est restée fermée. Un voyage au Burkina Faso aurait pu être organisé avec un pasteur de Ouagadougou mais les épreuves m’ont prises.

Dans cette tourmente mes rêves d’alors se sont envolés.

Ce qui m’a sauvée ? Dieu bien sûr, et Dieu à travers le théâtre. J’ai commencé à écrire ma propre pièce et à la monter, je me réconciliais alors avec mes envies de jeunesse : l’art. Je me suis mise à rêver de travailler dans l’art mais les seules portes qui se sont ouvertes sont celles que j’ai initiées.

Puis, les enfants sont venus, merveilleux dons de Dieu qui chamboulent une vie, qui créent des sentiments nouveaux insoupçonnables, qui révèlent un regard neuf sur la réalité de la vie. Que deviennent alors ces rêves d’antan ? Quelle est la légitimité de ces rêves quand votre propre rapport à la vie s’en trouve ainsi transformé ?

Ce qui persiste aujourd’hui, c’est le désir de prier pour l’autre, de le guérir, de participer au plan de Dieu pour l’homme.

Monter à nouveau une pièce de théâtre demande tellement d’énergie qu’aujourd’hui je ne m’en sens pas la force.
Travailler dans l’humanitaire pour l’humanitaire ne rime plus à rien car tout perd de sa saveur quand Dieu n’en est pas au cœur.

Alors, missionnaire rue des entrepreneurs ?

vendredi 16 juillet 2010

Trahison

En un sens unique
Tu caresses
En douceur
Méticuleusement
Un dos qui ploie
Sous ton fourreau.

Emoussée,
Tu étincelles
Tu reluis.
C’est en ange de lumière
Que tu parais.
Tu tords, tu dévoies, tu interchanges
Lettres et voyelles.
Tu mens.

Ton tranchant est frais
Jusqu’à ce que coule un
Sang tiède que verse l’arc brisé.
Aiguisée,
Tu égratignes, entailles jusques aux
Profondeurs.

Je choisis l’épée à double tranchant,
Sincérité et vérité.
Le menteur est démasqué
L’artifice est mis à nu
Le fade devient savoureux.

Maintes fois blessée
Je crois d’un cœur plus que jamais résolu
En ton amour.

Inde, Avril 2007

jeudi 15 juillet 2010

HOMMAGES

- I -


- … Merci.

Une porte est soigneusement fermée. Attenante, une bibliothèque pour enfants, fournie en BD, Bibliothèque Verte, Rose et autres. Au-dessus, un paquet de mouchoirs à portée de mains.
En vis-à-vis, un store, déroulé sur une fenêtre haute et étroite, joue à cache-cache avec les rais que filtrent, juchés sur les buildings, les nuages. Au-dessous, un radiateur électrique.
Sur le côté, un banc, simili : trois planches de bois revêtues d’un skaï lézardé bleu-noir, biseautées, sans dossier, à même contre un mur bleu. Le skaï légèrement échancré, un maillage blanc se découvre, susceptible de s’agrandir sous les allées et venues d’un doigt qui égrène nerveusement les secondes où à chaque millième, une clé s’échappe.
En face, un second banc tout lisse, uni, à trois pas.

J’ai dû prendre appui sur ce banc dur et abîmé. Hélas, enfin, c’était le temps de se lever. J’ai enfilé mon cuir et saisissant fermement ma clé, je l’ai embrassée. Rapidement, les yeux baissés. Deux pas pour traverser la porte, cinq pour la deuxième, ne pas oublier d’éteindre la lumière, j’ai dévalé l’escalier, soulagée, pour un temps. Garder ce que j’avais reçu en moins de deux heures, surtout ne pas se le laisser voler en deux minutes, telle était mon obsession. Je suis remontée à pied, retour à la case. Puis un, deux, trois jours et finalement sept.

- … Merci.

Elle est partie.
Je suis triste.
Mais non, je ne dois pas voyons ! J’ai de la compassion, oui c’est ça de la compassion. Voilà, c’est mieux comme ça.


Encore une, une personne, un fardeau de plus.
Quand même c’est choqu…pas très bie.. … Arrête ! Qui suis-je pour la juger ? Et moi alors…
La grâce seule… la grâce seule… la grâce…


Ou bien

C’était dur cette fois-ci, une fois de plus, encore une.
Jusques à quand ?
Une fois n’a donc pas suffit pour qu’elle comprenne ?
Je suis fatiguée, et moi, et mes soucis alors… J’arrête.. J’en ai marre… J’abandonne.


Ou encore

Je l’aime bien cette petite…. Oui je l’aime bien.
Si seulement je pouvais porter ses souffrances, je le ferai.
Oui, je le ferai.


Il me serait facile de conclure que la vraie réponse est un patchwork des trois ou bien qu’elle est tout autre. A vrai dire, à ce jour, je n’en sais fichtre rien.


- II -



Des profondeurs de l’escalier, on entend des pas qui vont et viennent.
Les gens parlent et rient, avec éclats.
La porte est soigneusement fermée.
Est-ce qu’il pleut ? Où est le soleil ?
Un sfumato de store, nuages et buildings.
Le radiateur chauffe.
D’un côté, le maillage blanc se dilate.
La clé est tombée.
De l’autre, le paquet de mouchoirs est descendu.
En face, le second banc, est vide.

- …. A quoi tu penses ?
- …Rien…
- Il y a quelque chose d’autre qui te soucie ?
- … Non, non… ça va.

J’étais sincère… Mais tout restait difficile et mon visage imprimait avec fidélité mes pensées. C’était encore plissé et tordu. Une vague figée sur mon front, retenue au sein de l’arc tendu de mes sourcils.

- … Merci.

Et je m’enfuis.

Pourquoi ne me dit-elle pas tout ? Je pensais qu’elle me faisait confiance. Je vois bien qu’il reste quelque chose.
Comment puis-je atteindre les cieux si elle se cache ?


Oui, c’était vrai.
Malheureusement.

C’est toujours aussi triste… Mais j’étais pressée, il fallait que je parte.


Oui.
Ce n’était pas facile. Finalement, c’était comme une consultation. Difficile de se sentir comme un cas à traiter. Sans doute avais-je tort ! Enfin, les doutes subsistaient, toujours.

Je me soucie d’elle, c’est un fardeau que je porte avec Toi.
Oui, vraiment.


Oui, c’est ce qu’elle a fait.


- III -



Personne, le silence.
La porte était fermée.
Il faisait beau. Le ciel dégagé, la pièce était inondée de lumière, le store transfiguré.
Le radiateur était allumé.
Nous étions assises sur le banc échancré.
J’avais laissé ma clé dans mon cuir.

- Amen
- Merci.

Le dernier d’un cycle brisé. Le temps pouvait avancer et la vie continuer.
J’avais mis cartes sur table.
Tout.
Tout était dit.
Tout était transparent.
J’étais libre. Libre de lui demander de me prendre dans ses bras sans attendre son accord pour m’y réfugier.

- Tu vas me manquer
- Toi aussi
- C’est sincère

Le cycle s’est linéarisé et l’écriture fut libérée.

La phrase échafaudée, s’élargit.
Un mot puis un autre, elle s’appuie sur la virgule et
Respire.

Trop
Trop de mots,
Associés en piles et au front de face
Dans ma tête
Un paradoxe
Un dilemme
Une voie sans issue.

Les virgules se sont estompées
Les mots s’entassaient
Le poids des mots.

En extirper
Un
Si seulement, mais
Le trait d’union était tracé.
Et l’étirer jusqu’à ce qu’il claque…

Rien ne vaut une franche cassure
L’artefact est brisé
Liberté

Les virgules sont descendues, la phrase s’est bâtie.
Alors enfin le texte
Respire.



« Parler » quand ça ne va pas, c’est très simple comme verbe, ça relève de la foutaise, c’est complètement idiot et pourtant.
Dire, proclamer, implique, engage, consume.
Alors, je ne suis pas loin de recevoir pour avancer.
Parler, construire des phrases, laisser circuler le souffle de vie et
Respirer.

Voilà ce que j’ai appris.

Merci à tous deux.

Inde, Avril 2007

mardi 13 juillet 2010

Le rêve d'un voyage

Je les aperçois dans le noir.
Elles sont pincées avec une grande délicatesse, effleurées, appuyées, mises en suspension jusqu’au silence.
Je me sens invitée.
Invitée à m’abandonner entièrement, si naturellement.

Une hésitation…
Je tente de saisir l’effet qu’elles ont sur moi, mais en vain.
Ce ne sont que des cordes, tendues sur un manche en bois agrémenté d’une caisse de résonance.
Si la foi est un mystère la musique en est un aussi.
Larguer les amarres de la raison.
C’est le rêve d’un voyage.

Et je sens la douceur de ces quelques notes caressantes. Ce ternaire enivrant, m’entoure, m’embrasse de ces sons posés ça et là, tout en discrétion, justesse, sans dépasser un ton ni un temps.
L’harmonie.

Je cherche ces bras de douceur qui réconfortent toujours, que l’on ait raison ou tort.
Elle respecte l’incompréhension, le mystère, et instinctivement ne cherche qu’à serrer contre son sein son bien le plus précieux, en liberté et générosité.
Ces bras… Malheureux celui qui en fut privé. Il demeure abandonné.
Un ami, un parent, rien ne peut la remplacer, si ce n’est un Amour parfait.
Un Amour unique.
La source de tout où tout se fond en Lui.

J’ai ouvert les yeux.
« Lullaby », c’était le titre.


Paris, Avril 2007

vendredi 9 juillet 2010

La chute

Je me suis allongée sous son poids, au contact du sol, mes épaules.
Rien ne m’extirpait de cette torpeur.
Il ne me restait plus qu’à m’y lover.
Ma place apprêtée.
C’était doux.
Ecrasant.

La chambre devenait espace.
La matérialité existait ici,
Mais disparaissait là.
J’étais seule.
C’était vide.
Lumineux.

Une seule et simple ampoule rayonnait d’un éclat pesant,
Suspendue.
Mon regard satellisé soutenait cette source.
J’étais tractée.
C’était lourd.
Ardent.

Enfin, je perdis connaissance.

L’ampoule explosa.
Chaque éclat s’éloigna du fil incandescent selon une sphère inexorablement croissante.

Puis, la gravité.

Une pluie de verre que je regardais tomber lentement vers mon visage…
Alors touché avec douceur comme par des perles d’eau le long des aiguilles résineuses.

Rien, mon visage n’avait rien.
Je restais intacte.
Protégée.

Juin 2007

jeudi 8 juillet 2010

Article sur l'allaitement pour un magazine spécialisé...


La question fatidique « allez-vous allaiter ? » est donc tombée en cours de préparation à l’accouchement.

Ma réponse était plutôt une réponse par défaut, sans trop de conviction. « Oui » ai-je répondu, « mais de toutes les façons, si ça ne marche pas, ce sera le biberon » ai-je pensé. Et bien cela a marché ! J’ai allaité pendant 10 mois avec un immense plaisir. Outre les avantages mis en avant par les pros de l’allaitement (coût, facilité, santé du bébé et de la maman…), ce contact privilégié et intime avec son bébé est incroyablement naturel et indescriptible.

Jusqu’au jour où mon bébé a eu 10 mois et que sa demande lactale était de plus en plus vorace, j’ai naturellement senti que ce serait plus pratique et plus facile s’il passait au biberon. La transition s’est faite très simplement sans que je n’éprouve aucune culpabilité.

C’était le premier pas vers plus d’autonomie pour mon bébé et plus de liberté pour moi.


Paris, 16/02/2010

mercredi 7 juillet 2010

Des sentiments étranges qui m’ont animée ce matin...


Nous sommes un mardi matin, Z. est à la halte garderie ce qui me laisse du temps non pas pour m’occuper de moi mais pour emmener E. chez le médecin. Je dois lui faire faire un rappel de vaccin.

La visite se passe comme à l’accoutumée avec le même médecin. C’est un bon médecin, qui prend le temps de dialoguer avec ses patients avant de vous examiner tout de go. J’ai rencontré très peu de médecins de la sorte. Le temps de dialoguer avant d’ausculter, de prescrire et d’encaisser. J’apprécie ces médecins là. Ce doit être le deuxième que je connaisse.

La visite se passe donc comme à l’accoutumée jusqu’à ce que le médecin m’annonce qu’il quitte le cabinet. Et là, tout d’un coup, j’ai été submergée de divers sentiments inattendus. La déception, je vais devoir me rabattre sur un remplaçant, moins bon, ou alors prendre le temps d’en chercher un nouveau ce qui me casse les pieds. Une certaine tristesse, étonnamment, je m’y suis attachée à ce médecin pourtant ce n’est qu’une relation de patient à praticien, je ne comprends pas cette tristesse… Serai-je devenue comme ces personnes âgées pour qui la visite chez le médecin est une occasion de rencontre. Je renvoie rapidement cette pensée car je n’y suis jamais allée avec cet objectif, même s’il faut bien avouer que dans l’isolement que peut être par instant la vie d’une maman, une visite chez le médecin est un sujet qui s’organise et prend du temps.

La visite aurait pu se clore ainsi me laissant cogiter avec ces deux sentiments. Mais le médecin renchérit : « J’ai décidé de reprendre mes études, je vais faire un master en politique de la santé »

« Et cela permet de faire quoi ? »

« Travailler dans les ONG, les missions humanitaires, j’aime beaucoup voyager ».

Les vannes sont ouvertes, un flot de sentiments m’envahit, les rêves du passé ressurgissent à bâbord, les regrets à tribord, je chancelle et vacille intérieurement.

Que n’ai-je rêvé de travailler dans l’humanitaire au sortir de l’école d’ingénieurs.

Moi aussi, j’aime tant voyager !

Moi aussi, j’aime les études !

Je sens l’envie, le désir, la jalousie la comparaison se mêler en moi… il faut que je me ressaisisse !

Je prie.

Seigneur, je sais que ma destinée, mon identité est en Toi et uniquement en Toi. Qu’importe ces désirs si ce n’est pas ta volonté car tu sais, Toi, ce qui est le mieux pour moi.

Peut-être que cette femme regrette de ne pas avoir de famille. Aujourd’hui, j’ai une famille, un mari, des enfants. Je dois en prendre soin, m’en occuper, être là pour eux. Il y a un temps pour tout.

Nous ne sommes jamais contents de notre situation. Ceux qui doivent rester chez eux aimeraient voyager et ceux qui n’ont pas de chez soi aimeraient se poser.

A ce stade, je pourrai pleurer, mais je me raccroche à Dieu. Je reçois un coup de fil de M. qui tombe à pic. Je sais que nous allons nous voir. J’aime discuter avec elle car elle me change les idées. Elle est, je crois, très différente de moi mais nous avons des valeurs en commun qui nous rapprochent.

Nous avons discuté et mangé au restaurant, fait exceptionnel compte tenu de la logistique à adopter dans un lieu public avec les enfants. Finalement, cela s’est bien passé et cela m’a fait plaisir de manger au restaurant. Cela faisait bien longtemps. Cela me manque comme cela me pesait d’aller tous les midis au restaurant alors que je travaillais.

On n’est jamais content de ce que l’on a, n’est-ce pas ?

Paris, le 06/07/2010